samedi 20 décembre 2008

Test 01: Nouvelle n°1: Orion (partie 1/3)

Orion c’est comme ça qu’il s’appelle.
Ses cheveux brun s’unissent et ne se distinguent pas du reste de cette obscurité totale. C’est dans ce genre de nuit la que l’on apprécie vraiment le moindre filet de lumière, ou plutôt qu’on l’espère. Ne sachant même pas si on a vraiment les yeux ouverts ou fermés pour avoir une chance de le voir passer. Ainsi Orion seul et pied nu sur le goudron encore chaud de la route 125 qui mène à Sydney, vient de voir le dernier néon d’un panneau publicitaire pour un grand magasin de meuble en kit, s’éteindre et griller en une dizaine de petites étincelles. Comme pour inauguré d’un minuscule feu d’artifice son arrivé dans la pénombre et le néant qu’elle inspire. Quand on passe trop vite d’une lumière assez intense au noir complet, les yeux gardent sous forme de taches multicolores les dernières traces de lumière qu’a pu capter vos yeux. Et Orion, dans la sombre nuit qui l’encercle de toute part et le fige sur place, peu encore lire distinctement en couleur psychédélique « IKEA ». Pas une étoile ne décore la toile du ciel, Orion c’est son nom à lui aussi mais celui d’une galaxie lointaine composé de milliard d’étoile. A cette pensée il rigole nerveusement, et l’écho du désert lui rend cette fausse joie en décalé, comme dans la mauvaise doublure d’un vieux film qu’on aurait téléchargé par hasard. Sa chemise hawaïenne en lambeau sur tout le coté droit, colle à sa chair sanglante et à vif, et au bout de son bras gauche le 48mm chromé qui ballotte sous ses gémissement lui parait dix fois son poids d’il y a 4h. « NBD » ou Nice-Big-Dog c’est comme ça que Sophie appelait ce flingue, elle disait que ça faisait peur au cas ou mais que ça mordait pas. Orion lui, ne lui trouvait pas de nom, c’était juste flingue…
Sophie donnait toutes sortes de noms et d’abréviations à toutes sortes de choses. Elle disait que c’était mieux de parler d’un objet personnel de par la fonction qu’elle en tirait, plutôt que par les noms communs qu’on leur colle, qui veulent tout dire et rien dire, et sont complètement impersonnels. Son hamburger surgelé top budget était son « SMTDS », ou son Seul-Moyen-Temporaire-De-Survie. Chacune de ses cigarettes longues devenait ses « FCEP », ou ses Futurs-Cancers-En-Perceptive. C’est donc sans surprise qu’Orion l’avait entendu parler de leur billet de vol pour l’Australie comme de leur « PPLPAPDK », autrement dit leur Passe-Pour-Le-Paradis-Au –Pays –Des-Kangourou. Dans leur chambre d’hôtel à Canberra, il se rappelait que Sophie lui prenait déjà la tête pour son short sans poche, pour son « TMQSAR ». Parfois il ne lui demandait pas la version longue de ses termes pour s’épargner de comprendre une possible insulte personnalisée à son attention. Il repense à ça, au sourire de gamine impatiente quelle avait quand elle s’attendait à une vive demande d’explication, ou tentative d’explication pour ses appellations farfelus. Puis il s’imagine à nouveau la lèvre inférieure qu’elle retroussait pour prendre l’air triste et abattu comme dans les dessins animés pour gosse, quand il ne lui demandait tout simplement pas d’explication. Il repense à tout ça les yeux clos et près à déborder, essayant à présent de comprendre ce quelle voulait dire par « TMQSAR », de comprendre ce que ce fichu short pouvait signifiait pour elle. Il baisse les yeux comme pour le regarder, mais à nouveau en face à face avec l’obscurité totale, il renonce. Sourcils froncés il réfléchit, le sourire presque douloureux, en questionnant d’un cri le ciel qui ne voit pas, tout en empoignant le pan de son short de la main droite.
« TMQSAR… Ton-Machin- Qu’est-Sombre-A-Regarder ? » criait il la voix tremblante.
Quelques secondes passent dans le silence horrible de cette question qui l’accable à présent. Sa main gauche de plus en plus lourde, il tente de ranger son « NBD » dans son « TMAQSAR » sans poche mais n’y parvient pas.
Il dit alors dans un chuchotement à peine perceptible «Ton… ton… ton Truc-Moche-Qui-Sert-A-Rien ! ».
Et comme envahi par la joie de n’avoir jamais était aussi heureux, il hurle à nouveau, à pleine gorge sa réponse, la répétant 2, 3 fois, toujours de plus en plus fort. Puis il éclate soudainement dans un fou rire, se pliant sur lui-même, les coudes en appuis sur ses genoux, sa tête entre les mains. Mélangeant alors peu à peu rire et sanglot, jusqu'à ce que l’on entende plus que ses pleurs désemparés…

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